▬ " Vous m'aviez promis mon frère ! Vous me l'aviez promis ! "

e soleil dissimulait encore quelques rayons lorsque la silhouette frêle, revêtu d'une simple et légère robe blanche s'élança dans l'allée gravillonnée sans prêter attention à ces cailloux qui tentaient de meurtrir ses pieds nus. A cette apparition les deux hommes se retournèrent vers elle et l'hongre à la robe sombre manifesta une certaine impatience. Ewan stoppa le mouvement qui l'aurait conduit sur le dos de l'animal et se dirigea vers sa sœur bien matinale qui s'aventurait à l'extérieur bien légèrement vêtu, à la merci de la rude fraîcheur de cette terre d’Écosse.

▬ " Isobel, que faites-vous là ? " S'il ne pouvait s'empêcher de sourire comme à chaque fois qu'il était en présence de l'adolescente, son ton n'en était pas moins mécontent. Il ne manquerait plus qu'elle attrape une mauvaise toux à cause de cette excursion imprévue.
▬ " J'ai vu les malles, vous partez n'est-ce pas ? " Le duo fini par se rejoindre et la demoiselle se campa devant lui avec sa mine renfrogné qui fit sourire de plus belle son frère.
▬ " En effet. "
▬ " Vous aviez promis de m'emmener. "
▬ " Votre frère revient de campagne la semaine prochaine, ne voudriez-vous pas être présente pour son retour ? " Ewan eu la sensation que sa remarque était attendu car la réponse fusa plus rapidement qu'il ne l'avait prévu.
▬ " C'est aussi votre frère il me semble et vous savez bien qu'il n'affectionne guère de nous honorer de sa présence. " Peu à peu, la demoiselle semblait prendre conscience de la situation dans laquelle elle s'était plongée, du vent qui faisait battre ses cheveux sombres et sa frêle robe sur sa peau nue et des cailloux qui se pressaient contre ses pieds. Ewan l'observa piétiner discrètement, probablement à la recherche de la position la plus confortable.
▬ " Et que faites-vous de père ? "
▬ " Vous saurez le convaincre. " Un silence suivi ces paroles, chacun se jaugea, Isobel plantait son regard brun et décidé dans les yeux amusés de son frère qui constatait toute la résolution de la demoiselle. Finalement, ce fut la jeune femme qui gagna ce duel silencieux car l'homme afficha à nouveau un sourire et rompit le silence.
▬ " Que ne ferais-je pas pour vous être agréable ma chère sœur. " À ces mots, toute la conviction qu'avait déployé Isobel s'envola au profit d'un sourire et d'un élan de joie qui l'accrocha au cou de son frère.
▬ " Merci, merci, merci. " Un léger rire s'échappa des lèvres du marquis tandis qu'il s'employait à prendre la demoiselle dans ses bras pour la ramener à l'abri des épais murs du château d'Inveraray.
▬ " Je ne peux garantir le résultat de ma plaidoirie de votre cas auprès de notre père. "

es regards maladivement curieux le suivaient irrémédiablement depuis son entrée. Ewan avait donc finit par s'arrêter dans un coin du grand salon, facilitant ainsi la soif des plus curieux qui n'avait plus aucun effort à fournir pour le suivre des yeux si ce n'est esquiver les silhouettes mouvantes des danseurs. Et le fait de ne plus bouger finit par avoir l'effet escompté, il perdit de l'intérêt pour cette foule cancanante et trouva enfin un peu de calme. Les hommages cependant continuèrent à défiler devant lui mais le jeune homme était passé expert en la matière d'écourter ce genre de cérémonial grâce à son attitude qui démontrait une légère indifférence. Bien évidemment son comportement finissait bien souvent par attirer les médisances des petits bourgeois égratignés dans leurs orgueils mais il n'en avait que faire. Il n'était présent que par politesse envers le maître des lieux alors il ne sentait pas l'obligation de faire des ronds de jambes avec tous les invités d'autant plus qu'il y en aurait toujours un pour prononcer un "trait d'esprit" sur son accent gaélique que les anglais percevaient avec un aspect assez rustique et la fierté du Marquis n'appréciait guère ce genre de remarque. Dans tous les cas, Ewan se félicitait d'avoir trouvé assez de fermeté pour refuser à sa sœur de l'accompagner à cette soirée, il y avait ici trop de loups avides de bonne naissance pour une jeune fille pour lui. Lui-même attirait déjà bien assez les convoitises des crinolines alors mieux valait ne pas ajouter celles des redingotes. Le regard brun de l'écossais repéra au loin deux demoiselles qui conversaient dans leur coin en l'observant et il n'avait pas besoin de s'approcher pour deviner le sujet de leur conversation et de leurs gloussements.

▬ " On dit qu'il a cassé une promesse de mariage avec la fille unique du Duc de Buccleuch sous prétexte qu'elle ne lui convenait pas. "
▬ " Peut-être était-elle trop rustique et qu'il préfère notre charme plus raffiné. " Dit-elle en gloussant à nouveau alors que sa compagne se faisait sérieuse.
▬ " Au contraire, il paraît qu'elle est d'une rare beauté. D'ailleurs elle n'a pas tardé à trouver un autre mari, moins bien né que le marquis cependant. "
▬ " Et sa sœur ? Je croyais qu'elle l'accompagnait. "
▬ " Il semblerait qu'elle est une santé fragile mais si vous voulez mon avis, il a dû lui refuser le droit de se divertir ce soir. "
▬ " C'est un portrait assez déplaisant que vous peignez là en tout cas. "
▬ " C'est surtout celui d'un très bon parti ... "
▬ " Si on aime la rudesse du temps et apparemment aussi du cœur de ces terres nordiques. "

es deux jeunes femmes gloussèrent de concert avant de brusquement se calmer lorsqu'elles croisèrent le regard de leur cible qui fut bien heureux de les voir s'éloigner et de quitter son champ de vision. Il se demanda cependant quel genre de "on-dit" et autres rumeurs à son sujet avaient pu les faire rire ainsi.